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L'administration ne peut exclure, par principe, la prise en charge des frais d'avocats pour la rédaction d'une plainte simple au titre de la protection fonctionnelle fonctionnelle

Depuis quelques temps, les Ministères de l'Intérieur et des Armées et tout particulièrement la direction des affaires juridiques du Min Arm et le BRPF pour la DGGN viennent soutenir que le bénéfice de la protection fonctionnelle ne permettrait pas la prise en charge des frais d'avocats au titre de la rédaction d'une plainte pénale simple au prétexte notamment que ces diligences pourraient être effectuées directement par l'agent. Par une Ordonnance du 1er février 2023, Monsieur le Président du Tribunal administratif de RENNES condamne cette pratique. L'Etat devra donc rembourser une partie des frais engagés par l'agent bénéficiaire de la protection fonctionnelle.

Le droit à la protection fonctionnelle

Aux termes de l'article L 4123-10 du Code de la défense :

"Les militaires sont protégés par le code pénal et les lois spéciales contre les atteintes volontaires à l'intégrité de la personne, les menaces, violences, harcèlements moral ou sexuel, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils peuvent être l'objet.

L'Etat est tenu de les protéger contre les menaces et attaques dont ils peuvent être l'objet à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté. Il est subrogé aux droits de la victime pour obtenir des auteurs des menaces ou attaques la restitution des sommes versées aux victimes.

Il peut exercer, aux mêmes fins, une action directe, au besoin par voie de constitution de partie civile, devant la juridiction pénale (...)"

Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions et les limites de la prise en charge par l'Etat au titre de la protection des frais exposés dans le cadre d'instances civiles ou pénales par le militaire ou les ayants droit mentionnés au présent article.

Le présent article s'applique sans préjudice des dispositions de l'article L. 113-1 du code de la sécurité intérieure et de celles de l'article 11 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires."

Le Décret n° 2014-920 du 19 août 2014 relatif aux conditions et limites de la prise en charge par l'Etat de la protection fonctionnelle des agents publics pris en application de l'article L. 4123-10 du code de la défense précise en ses articles 1 à 3 :

"Article 1

La prise en charge par l'Etat des frais de justice que les militaires engagent à l'occasion d'une instance en réponse à des menaces et attaques dont ils peuvent faire l'objet est versée directement à l'avocat en cas d'accord entre le ministre de la défense et celui-ci, ou, à défaut d'un tel accord, au militaire intéressé au fur et à mesure du règlement par lui des frais qu'il expose.

Article 2

Le ministre de la défense peut décider de ne rembourser au militaire qu'une partie des frais exposés lorsque le montant des honoraires facturés ou déjà réglés apparaît manifestement excessif au regard, notamment, des pratiques tarifaires généralement observées dans la profession, des prestations effectivement accomplies par le conseil pour le compte de son client ou encore de la nature des difficultés présentées par le dossier.

Article 3

Les dispositions des articles 1er et 2 sont également applicables aux ayants droit de militaires mentionnés au septième alinéa de l'article L. 4123-10 du code de la défense à raison des menaces et attaques dont ils sont victimes du fait des fonctions du militaire auquel ils sont liés."

L'obligation mise à la charge de l'Etat

Reprenant ces dispositions, le Président du Tribunal administratif de RENNES, saisi par MDMH AVOCATS et d'une requête en référé provision rappelle dans son ordonnance du 1er février 2023 (N° 2201312)  l'interprétation qui doit être celle de ces dispositions en précisant :

"4. Si ces dispositions font obligation à l’administration d’accorder sa protection au militaire victime de menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dans l’exercice de ses fonctions, protection qui peut prendre la forme d’une prise en charge des frais engagés dans le cadre de poursuites judiciaires qu’il a lui-même introduites, elles n’ont pas pour effet de contraindre l’administration à prendre à sa charge, dans tous les cas, l’intégralité de ces frais. L’administration peut décider, sous le contrôle du juge, de ne rembourser à l’agent qu’une partie seulement des frais engagés lorsque, notamment, ces frais n’étaient pas nécessaires pour assurer la défense de l’agent ou correspondent à des honoraires dont le montant apparaît manifestement excessif au regard, notamment, des pratiques tarifaires généralement observées dans la profession, des prestations effectivement accomplies par le conseil pour le compte de son client ou encore de l’absence de complexité particulière du dossier. En outre, en l’absence de convention d’honoraires, il appartient à l’agent, au fur et à mesure du règlement des honoraires qu’il effectue auprès de son conseil, d’en demander le remboursement à l’employeur dont il dépend."

Mais au delà et c'est précisément l'objet de la procédure qui a été initiée par MDMH AVOCATS pour le compte d'une de ses clientes gendarme qui, bien que bénéficiant d'une décision d'octroi de la protection fonctionnelle se voyait opposer un refus de prise en charge des honoraires liés à la rédaction de la plainte simple confiée à MDMH AVOCATS, l'Ordonnance du 1er février 2023 rappelle :

"5. Alors qu’il est constant que, par une décision du ..............., Mme ...................... s’est vue accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle en raison des faits de harcèlement moral dont elle a été victime dans l’exercice de ses fonctions, il ne résulte ni des dispositions citées au point 3 ci-dessus, ni d’aucune autre disposition applicable, que puissent être exclus, par principe, du bénéfice des remboursements qu’elles prévoient, les frais exposés par l’agent victime de tels agissements pour déposer une plainte contre leur auteur, au seul motif qu’une telle plainte ne serait pas assortie d’une constitution de partie civile, alors qu’une plainte simple est toujours susceptible de déboucher, à l’appréciation du ministère public, sur la mise en oeuvre de poursuites contre l’auteur des faits. A cet égard, la circonstance que plusieurs mesures avaient déjà été prises pour assurer la protection fonctionnelle de la requérante, notamment la conduite d’une enquête de commandement permettant d’établir les faits, ne suffit pas à priver l’intéressée du droit de bénéficier d’une prise en charge des frais qu’elle était susceptible d’exposer dans le cadre de poursuites pénales ultérieures contre leur auteur."

Ainsi, le juge des référés, juge de l'évidence saisi par MDMH AVOCATS sur le fondement de l'article R 541-1 du code de justice relatif à la procédure de référé provision, rappelle de façon claire et explicite que :

° par principe les frais d'avocats relatifs à la rédaction d'une plainte simple ne peuvent être écartés de la prise en charge due par le ministère sur le fondement de la protection fonctionnelle,

° et la circonstance que diverses mesures aient été prises pour assurer la protection fonctionnelle de la requérante ne suffit pas à priver l'agent du droit de bénéficier d'une prise en charge des frais qu'il a exposé ou est susceptible d'exposer dans le cadre de poursuites pénales ultérieures contre l'auteur.

Le juge des référés ajoute également que :

"6. Par ailleurs, si le ministre de l’intérieur fait valoir qu’aucune convention d’honoraires n’a été conclue avec l’avocat de M..................., cette circonstance ne fait pas davantage obstacle, par principe, à ce que l’intéressée puisse être remboursée, conformément aux dispositions de l’article 1er du décret du 19 août 2014, des frais exposés au fur et à mesure de leur règlement."

MDMH AVOCATS se satisfait de cette décision qui vient replacer les parties à la place qui doit être la leur :

  • le militaire et/ou gendarme, victime de faits, créancier de l'Etat devant être protégé,
  • et son administration, débitrice à son égard.

MDMH AVOCATS salue tout particulièrement l'action de sa cliente qui n'a pas craint de poursuivre ce contentieux pour faire valoir ses droits espérant surtout, au-delà de sa situation personnelle, faire avancer le droit des militaires, trop souvent lésés dans ce genre de situations.

Pour aller plus loin sur le sujet, retrouvez les articles de notre blog et notamment : 

° Différence entre la protection juridique de l'administration et la protection fonctionnelle, en cliquant ici 

° La protection juridique du gendarme et du militaire, en cliquant ici 

© MDMH – Publié le 3 février 2023

Maître Elodie MAUMONT
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