Le Conseil d'Etat a jugé par un arrêt en date du 1 er juillet 2021 que le recours devant une juridiction contre un titre de perception a pour effet d'interrompre la prescription biennale jusqu'à ce qu'une décision définitive soit rendue.
Il est parfois bon de rappeler les règles applicables à la prescription des rémunérations versées aux agents qui bénéficient d'un régime de prescription plus favorable qu'en droit commun.
En effet l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 prévoir un délai de répétition de l'indu de deux ans au lieu de 5 ans sauf omission de déclarer un changement dans la situation de l'agent susceptible de modifier ses droits à rémunération.
Dans l'affaire qui était soumise au Conseil d'Etat, il s'agissait d'un agent contractuel qui avait obtenu en première instance et en appel sur le recours formé par l'administration, l'annulation de titres de perception lui réclamant le remboursement de rémunérations indument versées en raison d'irrégularités de forme des titres de perception en cause.
La cour administrative d'appel de Bordeaux avait rejeté le recours de l'administration considérant que la prescription biennale était acquise au bénéfice de cet agent contractuel en jugeant que le recours formé contre les titres de perception n'avait pas eu d'effet interruptif de prescription c'est à dire que le délai de recouvrement continuait à courir et que dès lors la prescription était acquise.
Le conseil d'Etat a censuré le raisonnement de la cour administrative d'appel en rappelant les règles d'interruption de la prescription qui suit les règles posées par le code civil.
En effet, il est prévu par l'article 2241 du code civil que:
"La demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion.
Il en est de même lorsqu'elle est portée devant une juridiction incompétente ou lorsque l'acte de saisine de la juridiction est annulé par l'effet d'un vice de procédure".
Ainsi et dans ces conditions, dès lors que le recours contre un trop versé est porté devant une juridiction, le délai de recouvrement qui comme à courir à compter du versement indu sera interrompu par un recours devant la juridiction.
Rappelons par ailleurs que vous les militaires, la lettre d'information du CERH de l'existence d'un trop versé est également interruptif de prescription c'est à dire qu'un nouveau délai de deux ans commence à courir depuis un avis deux conseil d'Etat en date du 25 juin 2018.
Ainsi, et au regard de l'arrêt du conseil d'Etat l'inaction de l'administration pour recouvrer les sommes dues ne peut lui être reprochées tant que l'affaire est en cours devant la justice.
La tendance actuelle par les juridictions administratives et de permettre autant que possible le recouvrement des sommes indument versée dans le cadre d'un principe de préservation des deniers publics.
A cet égard, le conseil d'Etat précise que :
"5. Sauf dispositions spéciales, les règles fixées par l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 sont applicables à l'ensemble des sommes indûment versées par des personnes publiques à leurs agents à titre de rémunération. En l'absence de toute autre disposition applicable, les causes d'interruption et de suspension de la prescription biennale instituée par les dispositions de cet article 37-1 sont régies par les principes dont s'inspirent les dispositions du titre XX du livre III du code civil.
6. Il résulte des principes dont s'inspirent les dispositions des articles 2241 et 2242 du code civil, tels qu'applicables aux rapports entre une personne publique et un de ses agents, qu'un recours juridictionnel, quel que soit l'auteur du recours, interrompt le délai de prescription et que l'interruption du délai de prescription par cette demande en justice produit ses effets jusqu'à l'extinction de l'instance.
7. Il s'ensuit qu'en jugeant que la prescription biennale instituée par l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000, applicable aux créances afférentes aux trop-perçus de rémunération de Mme A..., ne pouvait avoir été interrompue par le recours contentieux formé par l'intéressée tendant à l'annulation des titres de perception émis par l'administration en vue du recouvrement de ces créances, et en en déduisant qu'aucune régularisation des titres de perception annulés n'était possible, la cour administrative d'appel de Bordeaux a commis une erreur de droit" (Conseil d'Etat 1er juillet 2021 n° 434665)
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© MDMH – Publié le 18 novembre 2021