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Eligibilité des militaires à des mandats électifs : que prévoit la loi?

Publié le 07/02/20

L'article L 4121-3 du Code de la défense rappelle l'interdiction pour les militaires d'adhérer à des groupements ou association à caractère politique. De même, les militaires sont exclus de part leur statut aux mandats électifs en raison de l'incompatibilité  inhérente à ces deux fonctions.

Cette interdiction toutefois n'est plus absolue grâce à une décision du conseil constitutionnel de sorte que les militaires peuvent désormais accéder à certaines mandats électoraux qui restent compatibles avec le statut militaire.

L'interdiction de tout mandat électif censuré par le conseil constitutionnel

Le Code électoral prévoyait dans ses articles L 46 que :

"Les fonctions de militaire de carrière ou assimilé, en activité de service ou servant au-delà de la durée légale, sont incompatibles avec les mandats qui font l'objet du livre I (...)"

L'article L 237-1 du Code électoral prévoyait quant à lui que:

"Les fonctions de conseiller municipal sont incompatibles avec celles :

1° De préfet ou sous-préfet et de secrétaire général de préfecture ;

2° De fonctionnaire des corps de conception et de direction et de commandement et d'encadrement de la police nationale ;

3° De représentant légal des établissements communaux ou intercommunaux mentionnés aux 1°, 2° et 3° de l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière dans la ou les communes de rattachement de l'établissement où il est affecté.

Les personnes désignées à l'article L. 46 et au présent article qui seraient élues membres d'un conseil municipal auront, à partir de la proclamation du résultat du scrutin, un délai de dix jours pour opter entre l'acceptation du mandat et la conservation de leur emploi. A défaut de déclaration adressée dans ce délai à leurs supérieurs hiérarchiques, elles seront réputées avoir opté pour la conservation dudit emploi".

Ces dispositions avaient soumises à l'avis du conseil constitutionnel en raison de l'interdiction absolue faite aux militaires d'être élus tout en restant militaires.

Ces dispositions étaient critiquées par le militaire requérant en ce que :

"(...) l'incompatibilité générale entre les fonctions de militaire de carrière et l'exercice de tout mandat électif entrant dans le champ d'application de l'article L. 46 du code électoral, et spécialement au sein de l'assemblée délibérante d'une collectivité municipale n'est pas justifiée par la nécessité de protéger la liberté de choix de l'électeur ou l'indépendance de l'élu contre les risques de confusion ou de conflits d'intérêts ; que, par suite, les dispositions contestées méconnaîtraient le droit d'exercer un mandat électif dont jouit tout citoyen en vertu de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ;(...)"

Ces interdictions se justifiaient en raisons des dispositions des articles 20 et 21 de la constitution qui prévoient que

"Le Gouvernement décide, sous l'autorité du Président de la République, de l'emploi de la force armée ; que l'exercice de mandats électoraux ou fonctions électives par des militaires en activité ne saurait porter atteinte à cette nécessaire libre disposition de la force armée ;"

L'interdiction absolue déclarée inconstitutionnelle

Le conseil constitutionnel a, par décision n° 2014-432 du 28 novembre 2014,  examiné la constitutionnalité des dispositions des article L 46 et L 237 du Code électoral à la lumière de l'article 6 de la déclaration des droits de l'Homme et du citoyens qui prévoir que la loi

« Doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse. Tous les citoyens étant égaux à ses yeux sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents »

Le conseil constitutionnel a considéré que les mandats des conseillers généraux étaient bien incompatible avec l'état de militaire de carrière ou assimilé mais il relève cependant que les fonctions de conseiller municipal que :

"(...) le législateur a institué une incompatibilité qui n'est limitée ni en fonction du grade de la personne élue, ni en fonction des responsabilités exercées, ni en fonction du lieu d'exercice de ces responsabilités, ni en fonction de la taille des communes ; qu'eu égard au nombre de mandats municipaux avec lesquels l'ensemble des fonctions de militaire de carrière ou assimilé sont ainsi rendues incompatibles, le législateur a institué une interdiction qui, par sa portée, excède manifestement ce qui est nécessaire pour protéger la liberté de choix de l'électeur ou l'indépendance de l'élu contre les risques de confusion ou de conflits d'intérêts ; que, par suite, le premier alinéa de l'article L. 46 du code électoral doit être déclaré contraire à la Constitution ; que, par voie de conséquence, les mots : « à l'article L. 46 et » figurant au dernier alinéa de l'article L. 237 du même code doivent être également déclarés contraires à la Constitution ; (...)"

La prise en compte des mandats électifs pour les militaire et le détachement de plein droit

La décision rendue par le conseil constitutionnel a permis une évolution positive autorisant ainsi les militaires de carrière ou de contrat de se présenter aux élections municipales dans des communes de moins de 9.000 habitants.

De même, les mandats de conseillers communautaires sont également autorisés dans des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité (EPCI) propre regroupant moins de 25.000 habitants

Afin de permettre l'exercice de ces mandats, les militaires concernés n'auront plus à exercer uen option mais à demander à être placés en position de détachement dans les conditions prévues à l'article L 4138-8 du Code de la défense qui prévoit que  aux dispositions de l'article

"Le détachement est la position du militaire placé hors de son corps d'origine. Dans cette position, le militaire continue à figurer sur la liste d'ancienneté de son corps et à bénéficier des droits à l'avancement et à pension de retraite. Les conditions d'affiliation au régime de retraite sont fixées par décret en Conseil d'Etat.

Le détachement est prononcé de droit, sur demande agréée ou d'office.

Le détachement d'office est prononcé par le ministre de la défense ou, pour les militaires de la gendarmerie nationale, par le ministre de l'intérieur, après avis d'une commission comprenant un officier général et deux militaires de grade égal ou supérieur à celui des intéressés.

Le militaire détaché est soumis à l'ensemble des règles régissant la fonction qu'il exerce par l'effet de son détachement, à l'exception de toute disposition prévoyant le versement d'indemnités de licenciement ou de fin de carrière.

Le militaire détaché dans un corps ou un cadre d'emplois civil conserve l'état militaire et demeure par conséquent soumis aux articles L. 4121-1 à L. 4121-5. Toutefois, le militaire détaché peut, en application du statut particulier de son corps d'origine, se voir appliquer les dispositions dont relèvent les fonctionnaires du corps ou cadre d'emplois d'accueil.

Sauf lorsqu'elle est de droit, la position de détachement est révocable et ne peut être renouvelée que sur demande.

Le militaire détaché est remplacé dans son emploi.

Pour les militaires servant en vertu d'un contrat, le détachement n'affecte pas le terme du contrat. Le temps passé en détachement est pris en compte dans la durée de service du militaire servant en vertu d'un contrat.

Sous réserve de dérogations fixées par décret en Conseil d'Etat, la personne morale auprès de laquelle un militaire est détaché est redevable, envers le Trésor, d'une contribution pour la constitution des droits à pension de l'intéressé. Le taux de cette contribution est fixé par décret".

Le détachement du militaire élu est de plein droit et ne peut être refusé par le ministre.

De même sa réintégration ne peut avoir lieu qu'à la demande de l'intéressé durant le temps du mandat.

Pour aller plus loin https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2014/2014432QPC.htm

© MDMH – Publié le 7 février 2020

crédit photo Mohammed Hassan pour Pixabay

Maître Aïda MOUMNI
Maître Aïda MOUMNI
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