01 55 80 70 80
87 Boulevard de Sébastopol 75002 Paris
Accueil » La gestation pour autrui : une prohibition vacillante ?

La gestation pour autrui : une prohibition vacillante ?

Publié le 09/07/15

Par Me Delphine MAHE, avocat collaborateur

En droit français, l’établissement de la filiation est régi par les dispositions de l’article 310-1 du Code civil, lequel dispose :

« La filiation est légalement établie, dans les conditions prévues au chapitre II du présent titre, par l'effet de la loi, par la reconnaissance volontaire ou par la possession d'état constatée par un acte de notoriété.

Elle peut aussi l'être par jugement dans les conditions prévues au chapitre III du présent titre. »

L’article 336 du même Code prévoit quant à lui que la filiation légalement établie peut être contestée par le Ministère Public si des indices tirés des actes eux-mêmes la rendent invraisemblable ou dans l’hypothèse de fraude à la loi.

C’est notamment en considération de ces deux règles élémentaires que la Cour de Cassation, réunie en Assemblée Plénière, a par un arrêt en date du 31 mai 1991 (Ccass ; AP, 31 mai 1991, n°92-13563) considéré que la convention par laquelle une femme s’engage, même à titre gratuit, à concevoir et porter un enfant pour l’abandonner à sa naissance contrevient non seulement au principe d’indisponibilité du corps humain mais également à celui de l’indisponibilité de l’état des personnes.

A ce titre, l’adoption plénière d’un enfant né dans de telles conditions, ne pouvait être considérée comme légale.

Par la suite, la Loi bioéthique n°94-653 du 29 juillet 1994 a consacré cette prohibition en introduisant dans le Code civil les articles 16-7 et 16-9.

Le Code pénal prévoit également des sanctions pénales en son article 227-12 à l’encontre de la gestation pour autrui (GPA).

Une première évolution a eu lieu à l’occasion des arrêts Mennesson c/ France (requête n° 65192/11) et Labassée c/ France (requête n°65941/11) rendus par la Cour Européenne des Droits de l’Homme le 26 juin 2014, posant la problématique d’enfants nés de gestations pour autrui à l’étranger et à l’occasion desquels cette dernière s’est livrée à une recherche de droit comparé.

Pour la Cour Européenne des Droits de l’Homme, l’interdiction de la GPA n’est pas contraire à la CESDH et le refus de transcrire un acte de naissance établi à l’étranger au motif que cette naissance est le fruit d’une GPA est compatible avec le droit au respect de la vie familiale.

En revanche, la CEDH a considéré que le refus de transcrire la filiation des enfants à l’égard du père biologique, telle qu’elle apparait sur l’acte étranger, constitue une atteinte disproportionnée à la vie privée des enfants, vie privée protégée par l’art. 8 de la Convention.

En effet, selon elle, chacun doit pouvoir établir les détails de son identité d’être humain, ce qui comprend sa filiation.

C’est dans ce contexte qu’ont été rendus, par la Cour de Cassation de nouveau réunie en Assemblée plénière, deux arrêts en date du 3 juillet 2015 (n°14-21323 et 15-50002)

Dans les deux affaires, il s’agissait d’un père de nationalité française qui avait reconnu la paternité d’un enfant à naître en Russie, étant précisé que l’acte de naissance de l’enfant mentionnait l’homme en tant que père et la femme ayant accouché en tant que mère.

Lorsque l’homme avait sollicité la transcription de l’acte de naissance russe à l’état civil français, il s’était vu opposer un refus du Procureur de la République, ce dernier soupçonnant le recours à une convention de gestation pour autrui.

La Cour de cassation a pour sa part considéré :

« (…) ayant constaté que l’acte de naissance n’était ni irrégulier ni falsifié et que les faits qui y étaient déclarés correspondaient à la réalité, la cour d’appel en a déduit à bon droit que la convention de gestation pour autrui conclue entre M. Y... et Mme A... ne faisait pas obstacle à la transcription de l’acte de naissance (…) »

Il s’agit dès lors, pour les ardents défenseurs de la gestion pour autrui, d’une avancée certaine en vue d’une reconnaissance.

Relevons toutefois que si la portée de ces arrêts ne doit pas être atténuée, elle ne concerne pas le cas de la transcription à l’état civil français d’une filiation établie à l’étranger à l’égard de parents d’intention.

 

© MDMH – Publié le 9 juillet 2015

 

 

 

Maître Elodie MAUMONT
Les derniers articles par Maître Elodie MAUMONT (tout voir)
Maître Elodie MAUMONT
Les derniers articles par Maître Elodie MAUMONT (tout voir)
Partager cet article :
Partager sur Facebook
Partager par e-mail
Partager sur LinkedIn
À la une
Une question ?
Consultation juridique
Catégories

Rechercher par date

Thématiques
Consultation juridique par téléphone
Vous avez besoin d'accompagnement ?
Vous avez des difficultés à trouver des réponses à vos questions s’agissant de votre statut de militaire ? Vous ne savez faire face aux problèmes que vous rencontrez ?
Vous vous sentez désorienté•e par les réponses contradictoires trouvées sur internet ou fournies par votre entourage ?

Les articles à découvrir également

Toutes les publications
menu
linkedin facebook pinterest youtube rss twitter instagram facebook-blank rss-blank linkedin-blank pinterest youtube twitter instagram