
Créé en 2001, le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA) constitue un mécanisme public de réparation destiné à garantir une indemnisation intégrale, rapide et amiable des préjudices subis par les victimes de pathologies provoquées par l'exposition à l'amiante. Si ce dispositif est aujourd'hui bien connu dans les secteurs industriels et hospitaliers, il demeure méconnu des militaires et anciens militaires, alors même que nombre d'entre eux ont été exposés à cette substance dans l'exercice de leurs fonctions, en particulier dans la marine, les unités aéronautiques ou les infrastructures techniques.
Le présent article entend présenter le rôle du FIVA, son champ d'application et ses modalités d'indemnisation, avant d'examiner les difficultés propres aux militaires et les solutions jurisprudentielles récentes qui permettent d'améliorer leur accès effectif à la réparation.
Institué par l'article 53 de la loi n°2000-1257 du 23 décembre 2000, relative au financement de la sécurité sociale pour 2001, et organisé par le décret n°2001-963 du 23 octobre 2001, le FIVA est un établissement public national à caractère administratif, placé sous la tutelle des ministères chargés de la santé, de la sécurité sociale et du budget. Il vise à offrir aux victimes une réparation plus rapide, plus accessible et plus complète que celle obtenue par les voies juridictionnelles classiques.
Son action repose sur deux principes fondamentaux :
Le FIVA peut, en outre, exercer un recours subrogatoire c'est à dire qu'il se substitue à la victime indemnisée contre toute personne responsable de l'exposition à l'amiante, notamment l'employeur, une fois la victime indemnisée.
Toute personne souffrant d'une maladie liée à l'amiante peut saisir le FIVA, sans condition de statut professionnel. La demande se fait à l'aide d'un formulaire administratif accompagné d'un certificat médical et de tous documents attestant de l'exposition.
Le FIVA dispose d'un délai de six mois pour instruire la demande et formuler une offre d'indemnisation. En cas d'accord, la transaction est définitive. En cas de désaccord ou de silence du Fonds, la victime peut saisir la cour d'appel compétente.
Les ayants droit peuvent également demander une indemnisation en cas de décès de la victime, au titre de leurs préjudices propres.
A notre sens, et dans le cas ou le militaire ou l'ancien militaire dispose d'ores et déjà d'une pension militaire d'invalidité au titre d'une maladie contractée du fait d'une exposition à l'amiante, ces montants viendront en déduction des sommes pouvant être allouées par le FIVA au même titre que le régime de la réparation intégrale et son articulation entre PMI et préjudices complémentaires (cf notre article en lien infra)
Le FIVA indemnise divers préjudices souvent ignorés des régimes forfaitaires comme la pension militaire d'invalidité (PMI). Il prend notamment en compte :
Cette approche globale permet une réparation plus conforme aux exigences du droit commun de la responsabilité.
De nombreux militaires, en particulier dans la marine nationale, ont été exposés à l'amiante du fait de l'utilisation massive de ce matériau pour l'isolation thermique et phonique des navires, véhicules blindés, hangars ou bâtiments techniques. L'exposition pouvait être directe (entretien, manipulation) ou indirecte (présence dans des locaux contaminés).
Malgré cela, la reconnaissance des maladies liées à l'amiante comme imputables au service reste complexe.
en effet, les militaires peuvent être confrontés à l'absence de trace d'exposition dans leur dossier administratif, faute de registres ou d'attestations notamment pour les anciens militaires radiés avant la réforme du régime de preuve des maladies professionnelles par la loi de programmation militaire du 13 juillet 2018.
Ainsi, il leur appartient de reconstituer leur parcours professionnel, leurs affectations, et de produire des témoignages ou documents techniques.
De plus, l'administration militaire oppose parfois la complexité de la preuve ou la présence de causes concurrentes pour refuser l'imputabilité au service.
Lorsqu'une pension militaire d'invalidité est concédée, du fait de la reconnaissance de l'imputabilité au service, elle est forfaitaire et ne couvre pas l'ensemble des préjudices.
Le FIVA peut intervenir en complément, sous réserve d'une évaluation distincte des préjudices.
Dans une décision très attendue (n° C4307), le Tribunal des conflits a tranché une difficulté récurrente : lorsque le FIVA agit par subrogation contre l'État, en tant qu'employeur public d'un militaire exposé à l'amiante, quelle est la juridiction compétente ?
L'affaire concernait un ancien marin ayant bénéficié d'une indemnisation par le FIVA. Le Fonds avait ensuite engagé une action en responsabilité contre l'État devant le tribunal judiciaire. Le conflit de compétence a conduit le Tribunal des conflits à se prononcer.
Ce dernier a jugé que le juge administratif était seul compétent pour connaître de cette action subrogatoire, dès lors que les faits reprochés à l'État étaient survenus dans le cadre de l'exécution du service public.
A cet effet, le tribunal des conflits a rappelé que cette action peut être intentée au titre de l'indemnisation de la victime mais aussi sur le fondement de la faute inexcusable.
Le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante est un outil de justice sociale, conçu pour compenser les conséquences sanitaires d'une exposition qui a longtemps été sous-estimée.
Pour aller plus loin :
Lire notre article sur la reconnaissance du préjudice d'anxiété cliquer ici
Lire notre article sur l'articulation entre PMI et préjudices complémentaires cliquer ici
© MDMH – Publié le 24 juillet 2025